Lorsqu’elle intègre, en 1987, l’Institut des Sciences et Techniques de l’Information (ISTI) actuellement Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication (IFASIC), Sylvie Elenge ne s’imagine pas un seul instant qu’elle travaillerait un jour à la Radio-Télévision Nationale du Congo (RTNC), alors Office Zaïrois de la Radiotélévision (OZRT). Trente-cinq ans après, la voilà installée, aux termes d’une ordonnance présidentielle, sur le toit de la plus haute tour de la commune de Lingwala. Gros plan sur celle qui ne rêvait pourtant pas d’entreprendre les études en journalisme.
C’est finalement par la grande porte que Sylvie Elenge entre aujourd’hui dans l’histoire la presse de la République démocratique du Congo (RDC), devenant du coup la deuxième femme à diriger la RTNC, après Nicole Dimbambu (ancienne elle aussi de l’ISTI). De nature plutôt discrète, voire effacée, pour certains de ses proches, femme de caractère, dotée d’une forte personnalité pour d’autres, elle se retrouve dans cette prestigieuse école de journalisme par un malheureux concours de circonstances, elle qui était tant attirée par « la colline inspirée » !
« Après avoir obtenu mon diplôme d’Etat au lycée Motema Mpiko, dans la commune de Kasa-Vubu, à Kinshasa, j’avais passé neuf mois à la faculté de Droit à l’Université de Kinshasa (Unikin) où, finalement, je n’avais pas été retenue », confie-t-elle. En réalité, Sylvie Elenge a vu apparaître son nom, en radiologie, à l’Institut Supérieur des Techniques Médicales (ISTM), toujours sur le campus de Kinshasa. « Pendant neuf mois, se souvient-elle, j’avais tenté, par tous les moyens, de trouver un étudiant qui accepterait de prendre ma place à l’ISTM et moi la sienne à l’UNIKIN ». Peine perdue, car la jeune lycéenne tournera définitivement le dos à « la colline inspirée ». N’ayant pas obtenu son inscription, elle va retourner en famille, ne sachant quoi faire.
Plus tard poussée littéralement dans le dos par son ancien professeur de français, Franck Ngyke (devenu lui-même journaliste au quotidien La Référence Plus), Sylvie Elenge va alors prendre le chemin de l’ISTI en 1987. Au 101, avenue Colonel Ebeya, elle obtiendra, au bout d’un parcours sans faute, son diplôme de licence en journalisme option politique intérieure.
Des mouvements associatifs plutôt que le journalisme
Son diplôme en journalisme dans sa gibecière, elle n’œuvrera pas dans les médias comme journaliste. Ce sont plutôt les mouvements associatifs qui intéresse cette fille d’officier militaire, originaire de la province de Maï-Ndombe, née le 19 décembre 1966, à la base militaire de Kitona, dans l’actuelle province du Kongo central. Ainsi, dans l’ivresse démocratique provoquée par l’ouverture politique du 24 avril 1990, elle participe à la création de l’Association Zaïroise des Droits de l’Homme (AZADHO) en compagnie de Guillaume Ngefa (aujourd’hui chargé du Département des Droits de l’homme au sein de la Mission des Nations Unies au Mali – MINUSMA).
Mariée et mère d’un enfant, elle travaille depuis plus de trente dans des ONG de défense des droits de l’homme et/ou de développement. « J’ai travaillé pour plusieurs ONG – nationales ou internationales- de défense des Droits de l’Homme ou qui s’occupent du développement, dont RCN Justice et Démocratie, ACORD, Panos Paris… », explique celle qui avoue connaître les attentes de ses compatriotes pour avoir fréquenté souvent le Congo profond.
« Au service des autres depuis longtemps »
C’est donc une figure de proue de la Société civile congolaise, avec une formation de journaliste, qui atterrit sur la tour de Kabinda. « Gestionnaire des ONG depuis près de trois décennies, je sais comment planifier, organiser, diriger, mais surtout gérer de gros budgets libellés en millions de dollars américains », rassure Sylvie Elenge.
« Après avoir appris ma nomination, j’étais à la fois émue et troublée, car je réalisais que je venais d’être projetée au-devant de la scène, a avoué la présidente du Mouvement des Initiatives des Femmes pour la Démocratie et le Développement (MIFED-CONGO) et de la Dynamique des Femmes du Maï-Ndombe (DYFEMA). Comme je me suis mise au service des autres depuis longtemps, j’ai finalement réalisé que le temps est peut-être arrivé pour que je me mette au service de mon pays ».
« Je suis de la génération qui était bercée par des divertissements de l’Office Zaïrois de Radio Diffusion et Télévision (OZRT), notamment les dessins animés, des clips musicaux, des longs métrages… Ces programmes m’avaient permis d’apprendre beaucoup choses avant mon premier voyage en Europe », se rappelle-t-elle, avant de faire remarquer que la RTNC reste un espace de divertissement, mais aussi le média plus suivi à l’intérieur du pays, même si ces programmes n’attirent plus.
Grâce au Seigneur Jésus-Christ
À l’occasion de son élévation en dignité, cette chrétienne pieuse rend d’abord grâce au Seigneur Jésus-Christ qui a inspiré le Président de la République pour tabler sur son dossier, alors qu’il devait en avoir sûrement plusieurs à sa disposition. Aussi promet-elle de se montrer digne de la confiance que ce dernier a placée en elle. « Je crois que l’heure est arrivée pour que je mette à présent tout ce que j’ai pu emmagasiner comme connaissances sur le banc de l’école au service de ma patrie », assure celle qui fait de la numérisation de la RTNC, son cheval de bataille.
Même si elle n’a jamais véritablement exercé le métier de journaliste, Sylvie Elenge avoue avoir été longtemps admirative des deux présentatrices de JT sur l’OZRT, Kabangu Tshita, Sakombi Bakonzo, et de celle du célèbre magazine politique 7sur7 sur TF1, Anne Sinclair. « C’est en revanche la présentatrice du JT sur la chaîne nationale, et enseignante de radio-télévision à l’ISTI, Tshilombo Bunduki, qui m’a alors profondément marquée », fait-elle remarquer. Dans la nouvelle génération des femmes journalistes, Nancy Odia ne lui a jamais laissée indifférente.
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