Le 16 septembre 2023, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont signé la charte du Liptako-Gourma, créant ainsi l’Alliance des États du Sahel (AES), un pacte de défense mutuelle et de coopération régionale. Cette initiative intervient dans un contexte de crise sécuritaire, politique et humanitaire dans la région, marquée par la présence de groupes djihadistes, les coups d’État successifs et le retrait des troupes françaises.
En effet, la France, qui était militairement présente au Sahel depuis 2013 dans le cadre de l’opération Barkhane, a annoncé son départ progressif du Niger d’ici la fin de l’année 2023, après avoir suspendu sa coopération avec le Mali et le Burkina Faso, également dirigés par des juntes militaires. Ce retrait a été accueilli avec soulagement par une partie de la population, qui reprochait à la France son ingérence, son inefficacité et sa complicité avec les groupes armés.
Face à ce vide sécuritaire, les trois pays de l’AES ont décidé de prendre leur destin en main et de s’unir pour faire face aux défis communs. L’Alliance vise à renforcer la coordination militaire, le partage de renseignements, la formation des forces armées et la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée. Elle s’engage également à promouvoir le développement économique, social et culturel de la région, en valorisant ses potentialités agropastorales et minières.
L’AES se présente donc comme une alternative crédible et légitime à la présence française, qui n’a pas réussi à stabiliser le Sahel ni à répondre aux aspirations des peuples. Elle s’inscrit dans une logique de panafricanisme, de souveraineté et d’anticolonialisme, qui séduit de plus en plus les opinions publiques. Elle bénéficie également du soutien de la communauté internationale, qui voit en elle un partenaire stratégique pour la paix et la sécurité dans la région.
Toutefois, l’AES n’est pas sans défis ni limites. Elle doit faire face à la résistance des groupes djihadistes, qui contrôlent toujours de vastes territoires et qui multiplient les attaques meurtrières. Elle doit aussi composer avec les tensions politiques internes, liées à la légitimité des régimes militaires, à la contestation sociale et à la diversité ethnique et religieuse. Elle doit enfin trouver les moyens financiers, logistiques et humains nécessaires à la mise en œuvre de ses ambitions.
L’Alliance des États du Sahel est donc un pari audacieux et prometteur, qui pourrait changer la donne dans la région. Mais elle devra faire preuve de cohésion, de volonté et de réalisme pour atteindre ses objectifs et répondre aux attentes des populations.
Meschack Lofaka